Le monde d’après sera sans cuir !

Une grande majorité de la population en porte en ayant bonne conscience. L’animal a été tué pour être mangé, autant utiliser sa peau. Le recyclage est une bonne chose pour la planète. Et puis, le cuir c’est résistant, il est possible de garder son manteau ou ses chaussures presqu’à vie ! Ce qu’il y a de bon avec les légendes populaires, c’est qu’elles rassurent et nous permettent de nous lover dans nos certitudes.

Et pourtant si des créateurs se lancent dans des confections réalisées à l’aide de nouvelles matières, notamment les fibres de certains végétaux, en y associant les termes éco-friendlyéco-responsable ou encore éthique, c’est que la filière du cuir n’est peut-être pas si noble

A. Les impacts du cuir …  

1. … Le cuir et ses impacts environnementaux

… Oui, la production du cuir est extrêmement polluante (cf. vidéo témoignage de la fondatrice de WWoW). La majorité du cuir (plus de 80%) provient des pays les moins avancés où les normes environnementales sont quasi-inexistantes. C’est en Inde et au Bangladesh que se trouvent les tanneries. Ces tanneries rejettent en moyenne 22 000 litres de déchets toxiques par jour dans les rivières ou les cours d’eau alentour : eaux usées mélangées aux produits toxiques comme le sulfate de chrome, restes de peaux…

Les tanneries utilisent le chrome – sulfate de chrome– pour tanner les peaux, ce qui nécessite des quantités d’eau astronomiques. De plus, l’élevage intensif d’animaux a pour conséquence la déforestation, l’érosion des sols, l’assèchement des rivières et la pollution des océans

2. … Le cuir et ses impacts humains.

Les reporters qui sont allés sur le terrain (image cf. article de Salomé) attestent que dès l’âge de 10 ans les enfants travaillent dans les tanneries, en Inde et au Bangladesh. La moyenne d’âge est à 45 ans parce que cette population de travailleurs n’a aucune protection, aucun équipement de sécurité. Ainsi ils sont pieds et mains nus dans ces cuves remplies de chrome et d’autres produits chimiques, sans parler des inhalations. Bien sûr, ils ont des salaires dérisoires pour des biens qui vont être ensuite vendus relativement cher. Les ouvriers développent des maladies de peau, des insuffisances respiratoires ainsi que des cancers. Quant à la production de cuir européenne, majoritairement en Italie (Toscane), ce sont des travailleurs sénégalais sous-payés qui s’en occupent. Je vous renvoie au reportage d’Élise Lucet pour Cash Investigation https://www.france.tv/france-2/cash-investigation/736319-luxe-les-dessous-chocs.html.

… et bien sûr, dans les pays en voie de développement, les droits du travail et les considérations écologiques sont inexistants. Quand un ouvrier de 10 ans travaille les pieds et les mains nues dans les bassins de chrome, on se doute bien…

3. … Acheter du cuir contribue directement à l’élevage intensif.

Plus de 1 milliard d’animaux sont tués cruellement dans le monde pour le commerce du cuir chaque année. La production de cuir dépend directement de l’abattage des bêtes.  

… Notre dissonance cognitive : Les européens/français mangeant de moins en moins de viande, mais pourtant la production de cuir ne fait qu’augmenter ! Qu’est-ce que vous en déduisez ? Que la production de cuir est extrêmement lucrative et que nous faisons naître des animaux dans le seul but d’exploiter leur peau. Ce sont des êtres sensibles doués d’une conscience.  Donc non, porter du cuir n’est en aucun cas du recyclage ! Le prix de vente d’un animal est à peu de chose près similaire au prix de sa viande. Le profit vient du « cinquième quart » donc de la vente de la peau de l’animal qui permet de dégager une marge financière confortable.

En résumé, le cuir n’est pas qu’un « déchet » d’animal abattu pour sa viande, mais bien une part non négligeable du chiffre d’affaires. En fonction de la bête, sa peau représente 10 à 50% de sa valeur, ce qui en fait le plus rentable des sous-produits ! Cette règle ne s’applique que pour les animaux à poils. Les autres animaux sont exclusivement tués pour leur peau, serpents, crocodiles, etc., sans que leur viande ne représente la motivation première.

La réalité, on ne voulait pas la voir, parce que bien sûr, elle est insoutenable.

« Le cuir pousse, au niveau mondial, à développer l’élevage d’animaux pour leurs peaux. Or, l’élevage est très coûteux en eau et en terres, alimente déforestation et changement climatique, sans compter les tannages toxiques au chrome et les mauvais traitements infligés aux animaux », détaille aujourd’hui Mathilde Dorbessan, chargée de communication auprès des entreprises pour PETA France.

B. Vous l’aurez compris, l’avenir de la maroquinerie ce sont les matières végétales !

  1. Dans le luxe : Stella McCartney, mais aussi Elon Musk utilise ces matières végétales

Stella McCartney n’a jamais utilisé de cuir depuis la fondation de sa maison en 2001. Les sièges des voitures Tesla sont en synthétique. Et si vous n’avez pas encore le budget, mais que vous souhaitez avoir un beau sac ou accessoire de maroquinerie, vous pouvez vous tourner vers la marque WWoW.

2. L’exemple d’une marque éthique de maroquinerie et d’accessoires

Salomé Dratwa conçoit avec la marque qu’elle a fondée, WWoWdes sacs, portefeuilles, portemonnaie, étuis à lunettes et bijoux entièrement avec des matières végétales.

Elle explique dans la vidéo son processus de création qui l’a d’abord conduit à créer des sacs et des pochettes en coton et polyuréthane – le polyuréthane n’émet pas de gaz durant sa fabrication à l’opposé du PVC. Puis elle a choisi de développer ses lignes majoritairement en Piñatexfibres des feuilles d’ananas, (Carmen Hijosa est la créatrice du concept révolutionnaire du « Piñatex »), en accessoirisant avec parcimonie certaines pièces de sa collection avec du liège. Cette entrepreneuse s’emploie à valoriser les femmes. Les noms de ses créations sont celles de femmes qui ont marqué l’histoire comme Virginia Woolf, Peggy Guggenheim, Délia Akeley, etc. Elle travaille majoritairement avec des femmes, mais également avec des hommes en réinsertion professionnelle ainsi qu’avec des personnes en situation de handicap. WWoW s’engage sur l’empowerment des femmes et la protection de l’environnement. La marque est labélisée « PETA-Approved Vegan » ainsi que « 1% for The Planet ».

Piñatex, feuilles des fibres d’ananas

Pour conclure, acheter du cuir c’est participer à cette maltraitance humaine, maltraitance animale et maltraitance environnementale. En vous tournant vers les alternatives, telles que le Piñatex (fibre d’ananas), le liège (écorce de chêne-liège), le Muskin (extrait du chapeau du champignon Phellinus ellipsoideus), vous participez à ce fameux monde d’après, où l’éthique est d’or .

Muskin, alternative 100% végétale au cuir animal. Il provient du Phellinus ellipsoideus, une sorte de gros champignon parasite qui pousse à l’état sauvage et attaque les arbres des forêts subtropicales.

La marque WWoW illustre qu’il est possible d’avoir de la maroquinerie et des accessoires résistants et éthiques. Et comme acheter c’est voter, manifestez vos convictions en ayant des produits qui ne sont pas issus : …

Boutique – atelier WWoW, Les Grands Voisins, Paris

  • … de l’exploitation, de la torture et de l’abattage d’animaux
  • … de filières qui bafouent les droits humains
  • … de l’exploitation irraisonnée des écosystèmes

L’industrie de la mode est actuellement sur le podium des industries les plus polluantes à l’échelle de la planète… ou devrais-je dire de la planète que nos enfants nous prêtent 😉 ! La mode vegan est la seule solution possible pour notre monde d’après. Et entre nous, quel est le plus extrême : détruire les écosystèmes en méprisant la nature, notre terre mère, et contribuer à la maltraitance animale par le massacre d’êtres sensibles sans raison OU manger des produits provenant de la terre, issus de filières BIO (et idéalement produits par le système de la permaculture) et respecter les animaux ?

Sans nul doute que vous choisirez, à partir de maintenant, des produits ayant un impact écologique le plus faible possible sur notre environnement ! Nous, les humains, en tant qu’individus, avons des impacts sur les vies humaines, animales, végétales et minérales. Il est maintenant temps de mettre nos croyances passées au rebut, de valoriser nos prises de consciences individuelles et collectives vers ce changement de paradigme et de mentalité pour notre futur commun !  

Pauline Rouillé

Cliquer sur l’image pour accéder à la vidéo reportage de L’Effet Domino : « Slow fashion, mode éthique : WWoW, la maroquinerie végétale | Reportage | L’Effet Domino »

Vocabulaire :

  • Tannerie : travail des grandes peaux d’animaux (veaux, vaches, taureaux)
  • Mégisserie : travaille les petites peaux d’animaux (chèvres, agneaux, crocodiles, alligators, serpents, etc.)
  • REACH : règlement de l’Union européenne qui protège la santé humaine et l’environnement contre les risques liés aux substances chimiques.

INDICE HIGG

  • Impact global du liège => 14
  • Impact global du Piñatex => 60
  • Impact global du cuir tannage avec des végétaux => 162
  • Impact global du cuir tannage au chrome => 163

Encart sur les vaches dites « sacrées » dans la production de cuir :

Bien que les vaches soient les animaux les plus sacrés en Inde, cela n’empêche pas qu’elles soient toujours tuées pour leur peau dans ce un commerce cruel et corrompu.
Depuis qu’il est illégal de tuer des vaches jeunes et en bonne santé, dans la plupart des états en Inde, certaines d’entre elles sont empoisonnées ou délibérément rendues boiteuses afin d’être déclarées « aptes » à être abattues. (cf. suite via l’article d’Emma, La vérité sur le cuir – je vous conseille la lecture de cet article et en particulier sur l’élevage d’alligators pour la marque de luxe française Hermès).

Pour aller plus loin:

Retrouvez la ou les personnes interviewées

WWoW – Boutique Atelier – Les Grands Voisins, 74 Avenue Denfert-Rochereau, 75014 Paris Site : http://wwow.fr/ Horaires : – sur rendez-vous du mardi au vendredi : https://calendly.com/wwow-rdv/rendez-vous-boutique?month=2020-07 – samedi : 14h à 19h – 24h/24h : directement en ligne