Histoire de la migration nuptiale du crapaud : comment il nous renseigne sur l’Ă©tat du milieu aquatique et du milieu terrestre.
« Quand les crapauds chantent, le beau temps sâavance » Dicton françaisâŠ
⊠et justement, pourquoi ne les entend-on presque plus ?!
Pourquoi parler des crapauds en pleine pandĂ©mie ? Parce que justement, si on avait Ă©coutĂ© et pris soin des amphibiens et de notre faune sauvage, on nâen serait peut-ĂȘtre pas arrivĂ© lĂ Â ! Je sais, ça parait fou. Les batraciens, en plus dâĂȘtre extraordinaires, nous renseignent sur lâĂ©tat de nos milieux aquatiques ET de nos milieux terrestres. Si nous avions pris plus de temps Ă rĂ©flĂ©chir Ă notre dĂ©veloppement dâhumain, tout en considĂ©rant la place de ces « petites bestioles » dans nos Ă©cosystĂšmes, on aurait pu prendre conscience que lâhomme et lâanimal doivent vivre ensemble. Lâun ne peut pas dominer lâautre. Nous devons pouvoir vivre cĂŽte Ă cĂŽte.
Et pour commencer la semaine, je vous invite Ă partir en reportage avec Romain Espeisse, DĂ©lĂ©guĂ© dĂ©partemental de lâASPAS Eure-et-Loir, qui nous fait vivre cette incroyable migration nuptiale des crapauds. Un pĂ©riple qui sâavĂšre la plupart du temps dangereux puisquâils quittent leur lieu dâhivernation pour aller se reproduire ⊠ Romain nous prĂ©sentera Ă©galement les façons positives dâagir envers les crapauds ! Pour en apprendre plus : cliquez ici.
Lorsquâune marre subit une eutrophisation* (trop dâalgues, trop de plantes dans un milieu naturel qui empĂȘchent les rayons du soleil de passer, lâeau est appauvrie en oxygĂšne (hypoxie) les ĂȘtres vivants meurent alors), câest tout un Ă©cosystĂšme qui disparaĂźt. La population de crapauds ne peut plus se reproduire, les prĂ©dateurs de ces derniers nâont plus de nourriture, ils sont alors contraints de se rapprocher des zones habitĂ©es par les humains.
Certes, comme nous les humains, les animaux ont des agents pathogĂšnes qui vivent en eux. On a tous des microbes. Mais câest la transmission des microbes propres Ă lâanimal vers lâhomme qui nous est fatale aujourdâhui.
Comment en est-on arrivé là  ?
- La déforestation
a notamment engendrĂ© des maladies transmissent par les moustiques* porteur du paludisme (Katarina Zimmer, « Deforestation tied to changes in disease dynamics », The Scientist, New York, 29 janvier 2019). Les agents pathogĂšnes humains sont deux fois plus nombreux dans les zones dĂ©boisĂ©es que dans les forĂȘts restĂ©es intactes. Ou encore lâexemple des oiseaux migrateurs => perte des habitats, intervention de lâhomme par la chasse qui dĂ©stabilise lâĂ©cosystĂšme. - Lâurbanisation
en rĂ©duisant les habitats, nous avons poussĂ© les animaux Ă chercher leur nourriture proche de lâhomme (contact). On fait disparaĂźtre une quantitĂ© dâespĂšces qui avaient leurs places dans la chaĂźne alimentaire, comme par exemple lâopossum (petit marsupial carnivore de moustiques et notamment de tiques). - Lâindustrialisation effrĂ©nĂ©e
Pour assouvir son appĂ©tit carnivore, lâhomme a rasĂ© une surface Ă©quivalant Ă celle du continent africain afin de nourrir et dâĂ©lever des animaux destinĂ©s Ă lâabattage* (George Monbiot, « Thereâs population crisis all right. But probably not the one you think », The Guardian, 19 novembre 2015).  LâĂ©levage industriel, qui maintient dans des espaces confinĂ©s des animaux, engendre la multiplication aisĂ©e de microbes qui se mutent en agents pathogĂšnes mortels, Ă titre dâexemple, la grippe aviaire.
Alors Ă©videment, lâhomme est Ă incriminer et non pas lâanimal sauvage Ă lâorigine de ce coronavirus (Covid-19). Et en mĂȘme temps, en Ă©tant tous responsables, on peut donc tous prendre nos responsabilitĂ©s et faire notre part Ă la façon du colibri de Pierre Rabhi.
Cliquer ici pour avoir accĂšs Ă lâinterview passionnante « grand format » de Françoise Serre-Collet, LA spĂ©cialiste en France des reptiles et des amphibiens.
Quoi faire ?
– Participation Ă la construction de crapauducs et aux ramassages des crapauds,
– CrĂ©er un petit bassin dans son jardin et ne pas intervenir en y ajoutant des poissons,
– Soutenir les associations de terrain.
Et les solutions sont accessibles à tous !
Romain Espeisse et Françoise Serre-Collet nous expliquent tous deux lâimportance de prendre soin des habitats sauvages. Il est possible dâinverser la tendance. Comme le dit si justement Romain Espeisse, naturaliste, « Je pense que dans quelques annĂ©es, on aura une autre vision de tous ces animaux et ils seront protĂ©gĂ©s et chĂ©ris plutĂŽt que persĂ©cutĂ©s ». La nature et la vie animale doivent ĂȘtre Ă©rigĂ©es en valeurs prioritaires.
Pauline Rouillé
Remerciements :  A Romain, pour mâavoir alarmĂ©e avec bienveillance sur la nĂ©cessitĂ© de communiquer sur ce sujet, de mâavoir invitĂ©e Ă aller sur le terrain et pour sa passion contagieuse des animaux sauvages. A Mya, pour son engagement Ă trouver les plus beaux spĂ©cimens en reproduction ! A Françoise, pour mâavoir consacrĂ© son temps au MusĂ©um National dâHistoire Naturel afin de rĂ©habiliter « ces bestioles extraordinaires » comme elle les appelle, et ainsi de les considĂ©rer comme des animaux dont on doit prendre soin pour leur donner toute la place qui devrait ĂȘtre la leur.
Pour aller plus loin :
les ouvrages de Françoise Serre-Collet
« Sur la piste des reptiles et des amphibiens â Serpents, grenouilles, lĂ©zardsâŠÂ : Serpents, grenouilles, lĂ©zardsâŠ, sachez les reconnaĂźtre », 2013 (publiĂ©s en partenariat avec le MusĂ©um national dâhistoire naturelle)
« Grenouilles, crapauds & Cie : Parlez-moi dâanouresâŠÂ », 2017
« Salamandres, tritons & Cie », 2019
Sources : « DâoĂč viennent les coronavirus ? Contre les pandĂ©mies, lâĂ©cologie », par Sonia Shah, Le Monde diplomatique _ Mars 2020, « Jâaime les amphibiens ! » document ASPAS